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L'autoassemblage d'une simple molécule organique produit des phases cristallines d'une complexité extraordinaire : une publication dans la prestigieuse revue Nature !

Une équipe internationale à laquelle collaborent deux chercheurs de l'UNamur, Luca Fusaro et Nikolay Tumanov (Institut NISM, plateforme PC²), observe une famille de cristaux complexes issus de l'autoassemblage d'une simple molécule organique. Une découverte importante qui pourrait ouvrir la voie au développement de nouveaux matériaux.

English version available here...

Une équipe internationale de chercheurs dirigée par le Dr Riccardo Montis (Université de Manchester) et comprenant le Dr Luca Fusaro et le Dr Nikolay Tumanov (UNamur), a isolé une famille de structures cristallines extrêmement complexes obtenues à partir d'un simple sel chloré issu du composé fampridine[1].

L'autoassemblage moléculaire, c’est à dire l'association spontanée de molécules uniques dans des structures ordonnées plus grandes, représente une étape-clé dans plusieurs processus naturels, tels que la formation de cristaux, de protéines, de virus ou d'ADN à double hélice.  Les cristaux sont des matériaux solides composés d'atomes, d'ions ou de molécules disposés pour former un motif tridimensionnel ordonné et hautement symétrique (la structure cristalline).

Dans notre vie quotidienne, nous avons souvent affaire à des cristaux. Le sucre, le sel, les flocons de neige n'en représentent que quelques exemples. L'aspirine, le paracétamol et plusieurs composés pharmaceutiques sont produits sous forme de poudres cristallines et pressés pour former des comprimés.  Selon la manière dont les composants sont assemblés à l'état solide, le matériau résultant aura différentes propriétés physico-chimiques, telles que la solubilité, les températures de fusion, les propriétés mécaniques, etc.

Pour toutes ces raisons il est important de comprendre comment les cristaux se forment, la manière dont les molécules sont assemblées à l'état solide ainsi que la manière de contrôler les propriétés physico-chimiques.

Dans leur article, l'équipe de scientifiques a rapporté la découverte de quatre nouvelles phases cristallines du chlorhydrate de fampridine. Deux d'entre elles présentent une complexité inhabituelle et représentent la première observation des phases de Frank-Kasper pour une petite molécule organique. Des phases de Frank-Kasper ont été précédemment observées pour des alliages métalliques, de la matière molle et des super-réseaux de nanocristaux d'or.

Partant de cette observation, les chercheurs ont étudié les conditions de cristallisation de ces phases, découvrant qu'elles pourraient provenir d'un autoassemblage moléculaire inhabituel à l'état liquide, constitué d'agrégats sphériques de molécules. Cette découverte pourrait contribuer à la compréhension des mécanismes de nucléation des cristaux organiques et ouvrir des perspectives pour la conception de nouvelles classes de matériaux aux propriétés physico-chimiques réglables.

Dans l'équipe internationale collaborant à cette étude, l'expertise complémentaire de Luca Fusaro et Nikolay Tumanov, et les ressources techniques avancées de la plateforme PC² ont été nécessaires pour étudier l'autoassemblage à l'état liquide et caractériser les propriétés des structures cristallines résultantes, et ainsi aider à résoudre le puzzle.

Applications et perspectives

Cette étude représente une vérification de la réalité pour la communauté de l'ingénierie cristalline, visant à étudier et à concevoir un matériau cristallin avec des propriétés spécifiques. Le fait qu'une simple molécule organique puisse s'autoassembler pour former une structure cristalline d'une complexité extraordinaire confirme que la compréhension des règles régissant ce phénomène est toujours difficile.

L'observation d'agrégats sphériques de molécules à l'état liquide ouvre de nouvelles perspectives pour la conception de nouvelles classes de matériaux fonctionnels. Les auteurs suggèrent que ces objets sphériques pourraient être utilisés comme blocs de construction supramoléculaires et combinés avec d'autres espèces pour générer de nouveaux liquides ou matériaux cristallins avec des propriétés spécifiques.

Bien qu'il reste encore plusieurs questions à résoudre, cette découverte permettra sans aucun doute aux chercheurs, tant en recherche fondamentale qu'appliquée, d'explorer des voies sans précédent dans la conception de nouveaux matériaux.

Deux experts et des équipements de pointe

La plateforme PC² héberge des équipements de haut niveau et dispose d'une large expertise dans la caractérisation des propriétés physico-chimiques des matériaux par, entre autres, la résonance magnétique nucléaire (RMN) et la diffraction des rayons X.

Luca Fusaro a obtenu son diplôme en chimie à l'Università di Cagliari (Italie) en 2004. En 2009 il a obtenu son doctorat, obtenu en collaboration entre l'Università di Cagliari et l’ULB, étudiant plusieurs systèmes supramoléculaires en solution par RMN. De 2009 à 2014, il a travaillé à l'ULB, sous la direction du Prof Michel Luhmer, développant l'utilisation de la RMN hétéronucléaire en solution. Depuis 2014, il est Logisticien de Recherche à l’UNamur, responsable des spectromètres RMN, et directeur technique de la plateforme technologique PC² à l'Université de Namur.  Ses intérêts de recherche couvrent différents aspects de la chimie supramoléculaire et de la catalyse, avec un accent particulier sur l'utilisation de la spectroscopie RMN liquide et solide. Le laboratoire RMN hébergée à l'UNamur comprend quatre spectromètres RMN à haut champ pour les échantillons à l'état liquide et solide, avec des champs magnétiques compris entre 9,4 et 14,1 T (400-600 MHz).

Nikolay Tumanov est diplômé de l'Université d'État de Novossibirsk (Russie) en 2008 avec un master en physique du solide. Il a obtenu un doctorat (chimie du solide) de la même université en 2011, sous la direction du professeur Elena V. Boldyreva. Ses travaux de doctorat se sont concentrés sur des études expérimentales d'acides aminés à haute pression par des méthodes de diffraction. Il a poursuivi sa carrière en tant que chercheur postdoctoral à l'UCLouvain en étudiant les matériaux riches en hydrogène.  En 2016, il est engagé par le département de chimie de l'Université de Namur en tant que Logisticien de Recherche. Depuis 2016, il travaille à la plateforme technologique PC² en tant que spécialiste de la diffraction des rayons X et de l'analyse thermique. Le laboratoire de diffraction des rayons X de l'UNamur comprend un diffractomètre à rayons X monocristallin et deux diffractomètres à rayons X à poudre (haute résolution et routine).

Cette recherche a été rendue possible grâce aux équipements de haut niveau hébergés par la plateforme technologique PC² financée par l'UNamur et le FNRS.

L'équipe internationale

  • Université de Southampton - École de chimie, Southampton, Royaume-Uni | Riccardo Montis, (adresse actuelle : Université de Manchester - Département de génie chimique et des sciences analytiques, Royaume-Uni), Michael Hurthouse, Terry Threlfall, Simon Coles & Peter Horton (Service national de cristallographie - Université de Southampton
  • Kaust King Abdullah University of Science and Technology (KAUST), Thuwal, Arabie saoudite | Andrea Falqui (NABLA Lab, Division des sciences biologiques et environnementales et de l'ingénierie (BESE), adresse actuelle : Università di Milano, Dipartmento di Fisica, Italie) | Rachid Sougrat (Laboratoires principaux)
  • Université de Rouen Normandie, Laboratoire SMS — EA3233, Mont Saint Aignan, France | Gérard Coquerel & Anaïs Lafontaine
  • École de recherche en chimie, College of Physical Science, Australian National University, Canberra, Australie | David Rae
  • Université de Namur, Département de chimie, Institut NISM, Plateforme PC², Belgique | Luca Fusaro & Nikolay Tumanov

Consultez l'article en ligne: https://doi.org/10.1038/s41586-021-03194-y



[1] La fampridine est un médicament qui améliore la vitesse de marche de certains adultes atteints de sclérose en plaques

 

Contact : Luca Fusaro - luca.fusaro@unamur.be
Plus d'info : https://platforms.unamur.be/pc2/index