L’Observatoire astronomique a fonctionné de manière intensive durant le confinement
L'observatoire astronomique de l’UNamur, la nuit : on peut voir les instruments à l'avant-plan et les 4 étoiles qui forment le chariot de la Grande Ourse, au-dessus des télescopes.
André Füzfa est professeur au Département de mathématique (Faculté des sciences). Il donne cours d’astronomie, notamment, aux étudiants de blocs 2 et 3 ainsi qu’aux masters en mathématique et en physique. Il revient pour nous sur le déroulement de ses cours et sur le fonctionnement de l’observatoire durant le confinement.
Au début de la crise, comment avez-vous accueilli l’annonce de l’enseignement à distance ? Comment vous êtes-vous organisé ?
J'appréhendais (à raison) que les étudiants aient beaucoup plus de mal à suivre notre enseignement à distance que l'université à l'organiser. Il fallait prendre la mesure de la bifurcation qu'a représentée la mise en confinement, ce qui impliquait des renoncements comme celui d'évaluer les compétences de restitution des étudiants. Mais cet enseignement à distance est aussi une aubaine pour développer les facultés d'auto-apprentissage et de réflexion personnelle des étudiants. C'est pourquoi j'ai basculé mon cours principal de ce quadrimestre vers un mode d’évaluation continue, en décidant dès la mi-mars de remplacer les examens de juin du cours par une série de devoirs et un suivi personnalisé des étudiants. De plus, cette solution permettait d'alléger une session de juin qui s'annonçait difficile tant pour les étudiants que pour nos infrastructures d'enseignement à distance. Mais tous les cours ne se prêtent pas hélas à cette formule. Le cours d'astronomie par exemple, requiert de pratiquer... ce qui n'est pas possible sur place. Heureusement, l'observatoire était déjà bien opérationnel pour des utilisations à distance.
Vous donnez des cours d’astronomie, et vous utilisez de ce fait le nouvel observatoire de l’UNamur. Comment se sont déroulés les cours à distance durant le confinement ?
Pour le cours d'astronomie, j'ai d'abord enregistré des séances d'utilisation de l'observatoire à distance où on fait, en direct, le tour de quelques objets remarquables dans des constellations comme Orion ou la Grande Ourse. J'ai expliqué en direct le fonctionnement des instruments et les manipulations à réaliser. La difficulté principale était celle de tenir un timing relativement court dans une vidéo, alors que certaines nébuleuses nécessitent une minute de pose ou plus pour pouvoir être capturées avec une qualité suffisante. Et puis, l'observatoire est un outil complexe où on pilote à distance la coupole, le télescope, la mise au point, la caméra tout en s'assurant que tout se passe bien à l'intérieur du dôme et en surveillant la météo pour éviter la pluie. Il ne faut pas faire de mauvaise manipulation et, en cas de plantage ou de panne réseau, il faut se rendre jusqu'à Namur et grimper là-haut, dans l’observatoire, pour tout redémarrer... Cela ne m'est arrivé que deux fois sur deux mois d'utilisation presque quotidienne durant le confinement. J'ai également pu améliorer plusieurs réglages fins et installer de nouvelles fonctionnalités. L'observatoire devenant toujours plus performant, j'ai ensuite pu mettre à disposition des étudiants des données de qualité croissante, capturées à distance depuis l'observatoire afin qu'ils puissent s'exercer au traitement d'image, préparer un atlas de la Lune ou surveiller le Soleil... Au final, avec une météo exceptionnellement favorable, l'observatoire a fonctionné de façon intensive : pour les cours, pour la diffusion des connaissances via notre page Facebook « Astrocampus » et pour les futurs projets de formation par la recherche, par les nouvelles fonctionnalités que nous y avons installées durant ce beau printemps. Malheureusement, le confinement n’a pas permis pas d'organiser les modes d'évaluation prévus pour le cours d'astronomie en juin. Nous avons donc décidé collégialement de reporter l'évaluation de ce cours au 3e quadrimestre pour permettre aux étudiants de réaliser leurs projets personnels ou de donner à une classe l'animation qu'ils avaient préparée pour le Printemps des Sciences avant son annulation.
Comment vos étudiants se sont-ils organisés durant la crise ?
Les étudiants ont été soulagés de ne pas perdre le travail déjà engagé et de pouvoir reporter ce petit cours à plus tard, tout en espérant avoir la chance de pouvoir revenir sur le campus en été ou en septembre pour pratiquer à la coupole. Ils m'ont avoué également que les vidéos du cours et les photos mises à disposition leur faisait une petite évasion dans un quotidien fort renfermé... Pour la suite, on s'adaptera en fonction de la situation et dans le meilleur intérêt des étudiants.
Avez-vous des anecdotes sur votre vie en confinement ?
Pour le 1er avril, j'avais préparé à l'avance un canular en prenant deux séries de photos à l'observatoire d'une galaxie dont l'aspect ressemble fortement à... un ovni. Le jour J, j'ai publié sur la page Facebook « Astrocampus » une photo de cette galaxie dont j'avais délibérément dégradé la qualité. J'ai accompagné cette photo d'un commentaire pseudo-scientifique ainsi que d'un graphique, sorti d'un article de recherche en préparation, qui était censé montrer que l'ovni avait laissé une trace sous forme d'ondes gravitationnelles dans un prétendu détecteur prototype. Un canular qui a touché à ma grande surprise 8919 personnes ! Alors que je venais d'être contacté par un journaliste, j'ai publié le lendemain le démenti explicatif. Ce démenti a quant à lui touché 4142 personnes. J'espère que les autres ont tout de même fini par apprendre qu'il ne s'agissait pas d'une invasion d'aliens à l'UNamur...
Avez-vous un "merci" ou un "coup de chapeau" à faire, et si oui à qui ?
Je souhaiterais exprimer ma profonde admiration pour "l'extraordinaire" professeur Benoît Muylkens et son équipe formidable qui ont fait face au virus et parfois aussi à la bêtise humaine pour donner corps au passage du Talmud: "Qui sauve une vie, sauve le monde entier".
Plus d'info :
https://www.unamur.be/soutenir/observatoire