Sortir de nos (idées sur les) prisons…
A l’heure où la presse parle de « prisons 5 étoiles », le Quai22, l’espace culturel de l’UNamur, et la Faculté de droit ont organisé des activités relatives au milieu carcéral. L’objectif ? Permettre aux étudiants, mais également au grand public, de s’interroger sur la signification de la peine de prison aujourd’hui : l’enfermement est-il la seule forme de sanction suite à une infraction ? Quel sens porte-t-il intrinsèquement auprès du public ? Qu’apporte-t-il au détenu ?
En collaboration avec la Fondation pour l’Assistance Morale aux Détenus (FAMD) et le Centre d’Action Laïque (CAL) de la Province de Namur, le Quai22 a accueilli récemment une exposition de photographies intitulée « Cicatrices à l’intérieur, un chemin vers l’extérieur ». Cette exposition itinérante a plongé le spectateur dans l’univers intime des détenus : des photographies et des récits de vie pour humaniser cet univers… souvent « bestialisé ». Plusieurs temps forts ont ponctués ce mois d’exposition au cours duquel se seront également déroulées, en Belgique, « Les Journées nationales des prisons ».
Un débat de société
Le vernissage du 17 novembre fut l’occasion d’une conférence-débat avec Claire Capron, visiteuse de prison depuis plus de vingt ans, Eric Delchevalerie, directeur principal de la prison de Namur, Cécile Dethier, membre de la FAMD et Patrick Vanderveiken, conseiller moral dans les prisons d’Andenne, Dinant et Namur.
De cette conférence-débat ont ressurgi les éternelles questions que les personnes du secteur, les psychologues, les sociologues et les juristes, se posent depuis de nombreuses années : pourquoi nos politiciens persistent-ils à construire des prisons alors que nous savons depuis des dizaines d’années que ce n’est pas une solution ? Comment peut-on espérer réinsérer les détenus après les avoir brisés, humiliés, emplis de haine ? De quels modèles pourrions-nous nous inspirer pour sortir enfin de cette tradition d’enfermement, qui semble finalement causer plus de problèmes qu’elle n’en résout ? Le confort relatif de certaines prisons modernes n’est-il pas une façon de justifier un isolement toujours plus grand et ravageant ? L’opinion publique ne s’en trouve-t-elle pas confortée dans l’idée que « nous traitons beaucoup trop bien nos prisonniers », oubliant que la sanction est la privation de liberté et non les traitements dégradants collatéraux ?
Rencontre avec un ex-détenu
Parmi les activités proposées, la rencontre avec Jean-Marc Mahy, qui a passé près de vingt ans de sa vie en prison et raconte son parcours dans la pièce de théâtre « Un homme debout », a été un temps de discussion éclairant et poignant sur les conditions de vie en milieu carcéral : l’isolement, l’humiliation, la torture… mènent souvent à la colère et à la déshumanisation des hommes et des femmes qui passent un jour par la « case prison ». Et ces mêmes questions lancinantes : l’enfermement est-il LA solution ? Est-ce pertinent d’isoler et de désocialiser encore plus des personnes souvent déjà en marge de la société ?
Soutenir la cohésion familiale
Autre temps fort : le débat autour du documentaire « Car tu porteras mon nom », relatif aux relations entre enfants et parents incarcérés. Geoffrey Bultot, assistant social auprès de la prison de Dinant est venu apporter son éclairage sur la nécessité du lien à assurer entre des parents emprisonnés et leurs enfants et sur l’importance de la famille au moment de la sortie de prison.
Un dévernissage musical
Le 10 décembre, le dévernissage s’est déroulé en musique avec le concert « Taule de dames » : le témoignage de 7 détenues de la prison de Berkendael mis en musique et chansons par un collectif de 5 chanteurs et musiciens. Un dernier moment interpellant, surprenant et émouvant…
Claire Rommelaere, pour la Faculté de Droit
Marie-Aline Fauville, Quai 22
Contact :
Marie-Aline Fauville et Claire Rommelaere